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Benin Country Programme Evaluation (2005)

15 janvier 2005

Depuis 1981, le FIDA a accordé au Bénin huit prêts d’un montant total de 91 millions de USD. En 1997, une première stratégie de pays pour la coopération entre le FIDA et le Bénin (COSOP) a été approuvée par le FIDA. Fondée sur l’expérience accumulée par les quatre premiers projets, elle visait la réduction de la pauvreté rurale, en mettant l’accent sur le microcrédit par la mobilisation de l’épargne villageoise et sur la promotion des organisations paysannes villageoises par un meilleur accès au marché et pour obtenir une part plus élevée pour les paysans, et spécialement pour les femmes, des revenus du commerce des produits agricoles.

Le FIDA et le Gouvernement du Bénin ont convenu que cette stratégie devait être révisée en 2004 à la suite d’une évaluation. Le cadre de cette dernière a été fixé dans le Document d’orientation, élaboré d’entente entre les deux partenaires. Deux missions ont préparé le travail : l’une pour une évaluation intermédiaire du plus ancien des quatre projets en cours, l’autre pour une revue préliminaire des projets du portefeuille. La mission d’évaluation1 proprement dite a séjourné au Bénin du 12 novembre au 3 décembre 2003. Elle a eu des entretiens à Cotonou avec le Ministère de l’agriculture, de l’élevage et de la pêche (MAEP) et des représentants des agences multilatérales et bilatérales de coopération, et s’est rendue sur le terrain visiter les unités de gestion des projets et un certain nombre de réalisations dans des villages couverts par les projets. Elle s’est terminée par un atelier de consultation et d’échanges, puis par une réunion de restitution, présidée par le Ministre de l’agriculture, de l’élevage et de la pêche, qui a pris connaissance d’un aide-mémoire synthétisant les observations et les recommandations de la mission et l’a discuté. La version finale de l’aide-mémoire a été remise le 3 décembre 2003 au MAEP.

Le Bénin s’avance sur la voie de la démocratie, avec probablement plus de succès que dans les pays voisins. La mouvance présidentielle a obtenu la majorité aux élections législatives de 2003. La décentralisation commence de se mettre en place et les premières élections communales ont eu lieu. Si la gestion budgétaire a été améliorée, la réforme administrative et la lutte contre la corruption stagnent un peu. Les médias sont vivants. La croissance économique tourne autour de 5% l’an depuis une décennie et les grands équilibres macro-économiques sont assurés. La privatisation des sociétés d’Etat est lente et la faiblesse des infrastructures freine le développement. Le secteur privé continue de se développer, plus dans le commerce que dans l’industrie, avec les risques que représente une économie épiphyte, comme l’a démontré une crise récente avec le Nigeria. Etre à ce point tributaire d’un grand pays voisin fragilise l’économie béninoise et les déterminants de sa croissance en deviennent assez volatiles.

L’agriculture béninoise est caractérisée par la prédominance de petites exploitations agricoles et la production croît au rythme de 3% l’an. Elle est suffisante pour mettre le pays à l’abri de la famine. Depuis 1990 et la fin de l’Etat omniprésent, le Bénin élabore étape par étape une stratégie de développement du secteur rural où les organisations paysannes et les privés sont appelés à jouer un rôle majeur.

Les 6 millions de Béninois restent pauvres dans leur grande majorité, avec un revenu annuel estimé à 365 USD par habitant et un indicateur de développement humain de 0.463 en 2002. Si la pauvreté urbaine a reculé de 28% en 1994 à 23% en 2000, la pauvreté a augmenté en zones rurales passant de 25% à 33% dans le même temps, due essentiellement à l’inadéquation des politiques économiques et sociales.

Le Bénin a adopté une Stratégie de réduction de la pauvreté (SRP) qui s’articule autour de quatre axes : le renforcement du cadre macro-économique, le développement du capital humain et la gestion de l’environnement, le renforcement de la gouvernance et des capacités institutionnelles, la promotion de l’emploi durable et la participation des pauvres au processus de décision. C’est une première esquisse prometteuse de développer un cadre adéquat et effectif de lutte contre la pauvreté.

Le COSOP, tel qu’il avait été formulé en 1997, était ambigu et peu logique et s’enfermait dans une approche trop strictement villageoise. Les objectifs n’y sont pas clairement hiérarchisés, allant du mandat du FIDA, à travers une stratégie régionale, puis nationale, pour aboutir à un plan opérationnel. Il est plutôt une discussion générale de certains aspects importants du développement rural. Néanmoins, les quatre projets soutenus par le FIDA :

  • Le Projet d’activités génératrices de revenus (PAGER), dès 1997, dans le sud du pays
  • Le Projet de microfinance et de commercialisation (PROMIC), dès 1999, dans la partie nord
  • Le Programme de développement des racines et tubercules (PDRT), dès 2001, national
  • Le Programme d’appui au développement participatif de la pêche artisanale (PADPPA), dès 2003, national,

qui ont pour objectif d’augmenter durablement les revenus des groupes visés de la population (pauvres et très pauvres, particulièrement les femmes et les jeunes), forment un programme cohérent et ont eu un impact significatif sur la réduction de la pauvreté chez leurs bénéficiaires. Les revenus et l’épargne ont augmenté et l’alimentation s’est améliorée. Les surfaces cultivées ont augmenté. De nombreuses activités de transformation et de commercialisation ont été lancées.

Parmi les principaux résultats, analysés du point de vue de l’efficacité, de l’efficience et de la durabilité, les institutions de microfinance rurale (ASF) de proximité sont prometteuses et touchent, à travers un réseau de 144 ASF, 820 villages, soit un bon tiers des villages du pays. Les femmes représentent environ 50% des actionnaires/clientes. Les ASF offrent une sécurisation de l’épargne et des petits crédits. A mi-2003, le capital des ASF se montait à 396 millions de FCFA déposés par près de 45 000 actionnaires, l’encours des crédits à 625 millions pour plus de 26 000 bénéficiaires. Les ASF contribuent ainsi à intégrer l’épargne rurale dans les circuits monétaires et, dans une certaine mesure, à rapatrier dans les villages une partie de l’épargne des émigrés. Les ASF, pour une bonne partie, sont rentables et couvrent l’ensemble de leurs frais de gestion, d’autres le seront à court terme. La pérennité du système des ASF, qui est l’innovation marquante du programme du FIDA au Bénin, passera par une structure faîtière légère qui assure la formation du personnel, qui fixe les règles de gestion, qui veille à la viabilité financière, qui passe par des alliances avec d’autres systèmes du même genre, qui offre des passerelles vers d’autres institutions à ses membres qui ont besoin de crédits plus élevés, et qui se fasse l’avocat de la microfinance auprès des instances nationales chargées de la supervision des systèmes d’épargne et de crédit, le but ultime étant un système viable sans le soutien des projets du FIDA.

D’autres activités ont été engagées pour réduire la pauvreté : l’alphabétisation avec un succès mitigé ; les activités génératrices de revenus, généralement par la transformation de produits agricoles à un stade peu sophistiqué, impliquant une faible valeur ajoutée (avec quelques exceptions plus rentables) ; les activités de commercialisation limitées souvent à l’achat de produits agricoles pour leur revente au bord de la grande route ou des marchés voisins, laissant une marge mince de profit ; l’augmentation de la productivité des racines et tubercules ; le financement d’infrastructures (puits, pistes, hangars de stockage, modules de classes, etc.). C’est un acquis indéniable pour les pauvres, bien qu’il y ait des cas où la question doit être posée de savoir si les pauvres n’ont pas été incités à emprunter pour des activités qui ne dégageront pas les ressources nécessaires au remboursement.

L’analyse stratégique et thématique du programme a permis d’établir un certain nombre de constats et de suggérer quelques recommandations pour l’amélioration du programme actuellement en cours et l’orientation qui pourrait être donnée au programme futur.

Le prochain COSOP, dont les grandes orientations pour réduire la pauvreté rurale peuvent restées les mêmes, mais avec plus d’ouverture sur les autres plans, portera une attention particulière à leurs liens avec la SRP pour assurer son appropriation par le gouvernement et il sera préparé à travers un processus participatif qui impliquera toutes les instances concernées. Il reste cependant un document de politique du FIDA.

Des partenariats stratégiques avec d’autres agences de coopération seront activement recherchés pour éviter les doublons et faire bon usage de ce qui existe déjà dans un esprit de coordination. Le FIDA jouera plus nettement son rôle d’avocat des plus pauvres et participera au dialogue sur les politiques de développement. A cette fin, la présence locale du FIDA devra être plus affirmée et plus permanente.

Les stratégies, aussi bien formulées soient-elles, doivent être adaptées aux développements subséquents (ainsi les travaux du FIDA sur la promotion des femmes n’ont pas été suffisamment reflétés dans l’exécution du programme, même si les femmes occupent une place importante dans les projets du FIDA) et particulièrement conserver leur cohérence avec les politiques du pays. L’articulation des projets soutenus par le FIDA avec les nouvelles structures communales mérite une réflexion approfondie. De même, l’articulation des projets entre eux doit conserver une grande cohérence qui pourrait aboutir à un seul programme national.

La participation des bénéficiaires (c’est-à-dire des pauvres) à la formulation et à la gestion du programme doit être clairement définie et appliquée. Elle est liée à la méthode retenue pour exécuter le programme : "faire-faire" en recourant à des prestataires de services choisis par les projets, ou "faire-avec" en plaçant d’emblée la responsabilité du développement entre les mains des bénéficiaires. Evidemment le passage d’une méthode à l’autre doit être graduel de manière à ne pas perdre les acquis d’efficacité des projets.

Une politique de ciblage des actions en faveur des pauvres doit conserver la souplesse requise pour accompagner ceux et celles qui, par leurs efforts, sortent de la pauvreté, mais ont encore besoin d’un appui à un autre niveau. Si les jeunes restent un groupe cible, la façon de les intéresser doit être revue. Les techniques de ciblage conduisent à une approche collective pour atteindre les groupes. Mais au plan des réalisations, les groupements d’autopromotion, même fortement appuyés, sont rarement économiquement viables à terme ; des solutions fondées sur le dynamisme individuel offriraient de meilleures perspectives.

Les activités génératrices de revenus doivent assurer à terme une vie décente ; elles n’ont souvent pas une rentabilité suffisante et les marchés locaux sont facilement saturés. Le programme devrait notamment adopter une approche de filière et nouer des alliances avec d’autres intervenants en aval. La rareté des terres disponibles dans la partie sud du pays impose la promotion d’activités "hors sol" (petit élevage, transformation de produits agricoles et de la pêche, artisanat).

La gestion proprement dite requiert aussi des améliorations :

  • Le FIDA devrait préciser le cadre requis pour gérer la souplesse qu’offre heureusement de plus en plus la formulation des projets, l’innovation qui requiert un certain courage, et les risques qui sont inhérents à toute activité de développement.
  • La supervision des projets porte beaucoup trop peu sur les aspects qualitatifs, innovateurs et stratégiques des projets. Le FIDA s’engage dans cette voie en cas de supervision directe, mais des mesures paraissent nécessaires pour fixer des normes de supervision et pour que les institutions coopérantes les appliquent.
  • Les systèmes comptables des projets doivent être standardisés et ne pas être fonction de l’institution coopérante qui assure la supervision. Les comparaisons entre projets en seraient facilitées, par exemple sur le montant des frais de gestion qui paraissent varier considérablement d’un projet à l’autre.
  • Des dysfonctionnements administratifs relatifs à la passation de marchés (achats de véhicules p.ex.) et au réapprovisionnement des projets en liquidités entravent très sérieusement la bonne marche des opérations (retard dans l’exécution, retard dans le paiement des salaires) et induisent des coûts importants. Des solutions doivent être trouvées pour assurer une gestion efficace et économique.

18. En conclusion, ce programme est un bon programme qui donne de bons résultats et qui a un impact réel sur la pauvreté dans son champ d’action. Amélioré pour être plus performant, plus durable et plus approprié par les pauvres, il mérite d’être poursuivi et si possible étendu.


1/ La mission d’évaluation était composée de M. Henri-Philippe Cart, chef de mission et socio-économiste, M. André Bourque et de Mme Pascaline Babadankpodji. M. Flemming Nichols s’est joint à la mission du 12 au 16 novembre et du 24 novembre au 3 décembre.

 

Evaluation Profile République du Bénin Projet d'activités génératrices de revenus (PAGER)

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