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Microfinance and Microenterprise Development Project

10 mars 2016

Évaluation de la performance du projet

Résumé

Contexte. Le Bureau indépendant de l'évaluation du FIDA (IOE) a entrepris une évaluation de la performance du Projet de développement du microfinancement et de la microentreprise (PDMM) à Djibouti avec comme objectifs de fournir un examen indépendant de la performance et des résultats du projet; et de formuler des conclusions et des recommandations pour la conception et la mise en œuvre des interventions en cours et futures à Djibouti. Cette évaluation est fondée sur une analyse documentaire et sur un travail de terrain en Mars-Avril 2015, et par des entretiens et des discussions avec divers intervenants clés sur le terrain, y compris les bénéficiaires.

Le PDMM. Le contexte du projet se caractérisait par l’inexistence de stratégie, de politique de microfinance et de cadre législatif et réglementaire de développement de la microfinance à Djibouti. De même, aucune structure financière décentralisée pérenne n’a été installée. Le secteur de la microfinance à Djibouti avait connu des expériences isolées de micro-crédit mais de portée limitée. Le PDMM se trace comme objectifs d’établir un réseau viable de caisses pour offrir des services financiers aux bénéficiaires, de mettre en place des services non financiers durables et des services de promotion de l’entreprise, de formuler et d’adopter une stratégie nationale de microfinance et de la microentreprise avec son cadre juridique et, enfin, de renforcer et de diversifier les activités rémunératrices pour le groupe-cible. Le projet s’articule autour de trois composantes (renforcement des capacités institutionnelles, développement du la microfinance et promotion de la microentreprise, et gestion et organisation du projet) . Le coût total initial du projet est de 3,944 millions d’USD avec financement à hauteur de 91% par le FIDA, un cofinancement du le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) (4%), une contribution du Gouvernement (3%) et celle des bénéficiaires (2%).

Performance du projet. Le PDMM a été pertinent par rapport au contexte institutionnel de la microfinance et celui de la promotion de la microentreprise, conforme aux orientations stratégiques du Gouvernement, aux priorités et stratégies du FIDA, et aux attentes et aux besoins des bénéficiaires pauvres, notamment les femmes. Le projet a créé une dynamique de dialogue politique et de partenariat entre les structures de l’État, les partenaires techniques et financiers, et les institutions locales. Toutefois, celle-ci était modérée par rapport à la gestion des caisses (politique de crédit), l’approche de la rentabilité et de la chaîne de valeur et à la promotion de la microentreprise.

En termes d’efficacité, le projet a mis en place un réseau de caisses ciblant les populations vulnérables et a permis la mobilisation de plusieurs bailleurs dont une contribution substantielle du Gouvernement. Les taux de réalisations sont élevés par rapport aux prévisions et le déboursement des fonds a dépassé les prévisions du rapport de pré-évaluation (RPE) de près de 1,9 fois. Toutefois, l’efficacité de l’appui aux microentreprises et des services non financiers est insatisfaisante. Par ailleurs, le manque d’une structure faitière a produit une confusion entre les fonctions de gouvernance, de gestion et d’appui des caisses. Le retard de trois ans entre la date d’entrée en vigueur du prêt et le démarrage effectif du projet ainsi que celui dans les décaissements des prêts par les caisses aux clients compromettaient le bon fonctionnement du PDMM.

Pour ce qui est de l’efficience, les caisses d’épargne et de crédit (CEC) ne dégagent pas toutes une rentabilité financière. Les lacunes dans la gestion des caisses ont entrainé une dégradation croissante du portefeuille. Les marges nettes des activités financées par les CEC montrent que leur contribution dans la formation des revenus est consistante pour les bénéficiaires du PDMM. Ces marges nous enseignent sur les potentialités d'accroître la valorisation des produits. L’analyse coût-bénéfice du PDMM montre que le Taux de rentabilité économique (TRE), la Valeur actuelle nette (VAN), et le ratio bénéfice-coût sont satisfaisants et montrent que le PDMM est rentable. Aussi, la performance du projet est jugée plutôt satisfaisante par la mission.

L’impact du projet sur les revenus et les avoirs des bénéficiaires était positif en raison notamment de l’augmentation de l'effectif des adhérents, du volume de l’épargne et de crédits octroyés, de la diversification et de l’expansion des activités, et de l’amélioration des revenus et des conditions de vie des clients. Les bénéficiaires enquêtés indiquent leur grande satisfaction des services des caisses bien qu’ils déplorent certaines faiblesses du fonctionnement et de la politique de crédit des caisses populaires d’épargne et de crédit (CPEC).

Pour ce qui est du capital humain et social, la stratégie du PDMM a contribué à l’évolution de structures communautaires locales et à l’inclusion des bénéficiaires aux fondamentaux de la microfinance et à la participation active des bénéficiaires. La dynamique impulsée par le PDMM a encouragé la mobilisation de l’épargne et la demande de crédit. Cependant, les organes de gouvernance et de gestion des caisses ont encore du chemin pour une plus grande autonomisation. Le passage des associations aux coopératives financières a été rapide.

Le PDMM a un impact évident sur le développement du secteur de la microfinance tant sur le plan stratégique qu’opérationnel, et sur la consolidation du contexte institutionnel de la microfinance à Djibouti. Cet impact a permis un dialogue politique soutenu aussi bien avec le gouvernement que d’autres partenaires techniques et financiers. L’impact sur le capital humain et social et l’autonomisation ainsi que celui sur les institutions et politiques sont jugés satisfaisants.

La durabilité du projet se manifeste à travers l’élaboration de la stratégie de la microfinance, d’un arsenal de textes, et l’implication de partenaires nationaux et internationaux. La création de coopératives et des associations, des groupes de solidarité, des organes de gouvernance et de gestion des caisses sont une assurance de la pérennité du projet. Si quelques coopératives avaient atteint un certain degré de maturité en termes d’autonomisation opérationnelle et de gestion, d’autres le sont moins et sont encore vulnérables. La durabilité financière est problématique à cause de l’importance des subventions de l’Etat, de la faiblesse de la rentabilité du portefeuille de l’autonomie opérationnelle et financière, et de l’augmentation continue des charges d’exploitation. L’évaluation juge la durabilité plutôt insuffisante.

Les principales innovations du PDMM sont la confection de nouveaux cadres de réflexion sur la microfinance et l’amorce d’un changement d’attitude des bénéficiaires vis à vis des actions de développement. Pour ces raisons, l’évaluation juge l’innovation plutôt satisfaisante. En matière d’autonomisation des femmes, les clients des CPEC sont dominés par les femmes qui avaient gagné en autonomie financière, et contribuent à la prise de décision au sein de la famille et de la communauté. Le PDMM a renforcé l’implication des femmes dans la gestion des caisses grâce aux formations, à l’information, à la sensibilisation, et à l’assistance technique. Par conséquent, l’évaluation considère ce critère comme satisfaisant.

La performance du FIDA et du Gouvernement est jugée plutôt satisfaisante malgré la rotation des chargés de programme de pays (CPP), et l’insuffisance de l’apport du Ministère de l'agriculture, de l'élevage et de la mer (MAEM), du Comité de pilotage du projet, et de l’opérateur privé.

Performance globale du projet. La contribution du PDMM est importante en termes de réforme du secteur de la microfinance à Djibouti, notamment à travers l’adoption de stratégies et textes législatifs, et le partenariat avec des institutions spécialisées en microfinance. Le projet a préconisé une approche inclusive des bénéficiaires les plus vulnérables, notamment les femmes par leur participation à la prise de décision relative à la gouvernance des caisses.Toutefois, la forte rotation des CPM et les retards dans le démarrage du PDMM avaient entravé son bon fonctionnement. La durabilité est handicapée par les contraintes de GRH des caisses; l’absence d’une structure faitière; l’importance des subventions; la faiblesse de la rentabilité du portefeuille et de l’autonomie opérationnelle et financière des caisses. L’évaluation de la performance est jugée plutôt satisfaisante.

Recommandations. Ci-dessous les recommandations pour le FIDA et le gouvernement.

  • Durabilité financière des caisses d’épargne et de crédit. Les interventions doivent être axées sur le renforcement des caisses pour qu'elles puissent mieux servir le groupe-cible. Le renforcement des capacités des caisses doit se faire par des formations, l’établissement de plans d’affaires réalistes, les échanges d’expériences en matière de bonnes pratiques en microfinance et microentreprise. Plusieurs facteurs peuvent assurer la durabilité financière, en particulier une politique de crédit et d’épargne plus cadrée, une stratégie de communication plus efficace. De même, il y a lieu de diversifier les produits financiers et non financiers des caisses tels la micro-assurance, les crédits d’équipements notamment pour les filières productives, et l’épargne-tontine.
  • Par ailleurs, des mesures rapides de redressement devront être prises comme le provisionnement et l’apurement des crédits en souffrance, l’augmentation de l’encours sain avec de nouveaux octrois soigneusement sélectionnés, et la réduction des PAR et des charges d’exploitation. La durabilité des caisses doit être recherchée à travers la valorisation et le renforcement des atouts des caisses par le renforcement des capacités des organes de gouvernance et de gestion.
  • L’organisation du réseau des caisses doit être progressive avant d’aboutir à une structure faîtière autonome dont la forme juridique doit être explicitée et constituées par les caisses, l’État, le secteur privé, les organisations paysannes et les fonds éthiques internationaux. Le FIDA doit continuer à investir dans le secteur de la microfinance et de la Microentreprise vu son rôle pionnier dans ce secteur, de l’intérêt porté par les différents partenaires du PDMM, et de la réponse à une demande sociale locale des pauvres.
  • La politique de crédit et d’épargne doit être révisée en coordination avec des règles prudentielles flexibles mais efficaces pour éviter les abandons des clients des caisses, encourager des demandeurs potentiels de prêt, et promouvoir l'inclusion financière. De même, l’épargne doit être encouragée dans les zones où la pénétration des institutions financières est très faible.
  • Durabilité des Activités génératrices de revenus (AGR) et des microentreprises. Pour orienter les emprunts vers des AGR et des microentreprises liées aux filières de production, Il y a lieu d’encourager l’approche en termes de chaine de valeur orientée vers les besoins des pauvres. L’éventail des activités couvertes par les caisses doit être élargi pour couvrir les activités productives (pêche). La création de microentreprises rentables avec la maîtrise des processus de production et de commercialisation sont à développer notamment pour les groupements féminins. Un accompagnement adéquat des AGR/MPE est à rechercher en termes de GRH, d’appui-conseil, de formation, d’analyse de l’offre de crédit, d’information des clients sur les marchés prometteurs. Les campagnes de sensibilisation et de communication pour drainer l’épargne vers les caisses doivent être entreprises et différenciée selon les clients-cibles. La portée des caisses doit être élargie dans leur zone focale d’intervention pour améliorer le ratio emprunteurs/adhérent et augmenter l’offre de services financiers variés. Par ailleurs, les investissements structurels réalisés dans la zone du PDMM (ports, chemins de fer, routes) devraient garantir la création d’AGR et de microentreprises qui vont utiliser les services des caisses.

Aspects socio-organisationnels du projet. L’approche utilisée par le PDMM pour la coordination des activités par une structure légère est à répliquer. Cette structure devrait s’intéresser en priorité aux aspects de programmation, de recherche de partenariats stratégiques. Mais, la coordination d’ensemble des activités liées à la microfinance et la microentreprise doit être renforcée et institutionnalisée. Les groupes solidaires viables doivent être développés et leur évolution doit être endogène et progressive pour éviter tout risque d’implosion. De même, les fusions de structures doivent être graduelles (associations, coopératives).

Executive summary

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