Republic of the Niger: Special Country Programme – Phase II - IOE
Republic of the Niger: Special Country Programme – Phase II
Evaluation terminale
Demarche et partenariat cle de l'evaluation
L'évaluation terminale du Programme Spécial National phase II (PSN-II) au Niger, a été entreprise par le Bureau de l'évaluation du FIDA, deux années après sa clôture. Le Partenariat clé pour cette évaluation du PSN-II a regroupé les parties les plus intéressées dans les conclusions de l'évaluation et censées mettre en œuvre ses recommandations. Il comprenait le Ministère du développement agricole, le Ministère de l'économie et des finances du Niger, la Division Régionale pour l'Afrique de l'Ouest et du Centre du FIDA, la Direction du programme de pays du PAM au Niger, l'UNOPS, Institution coopérante du programme, et le Bureau de l'évaluation du FIDA.
L'évaluation s'est basée sur un Document d'orientation conforme au cadre méthodologique défini par le FIDA, qui a été discuté avec les membres du Partenariat clé, d'abord au FIDA, puis, au Niger lors d'une mission préparatoire en juillet 2006. La mission principale de l'évaluation s'est déroulée du 19 septembre au 17 octobre 2006 et a mobilisé trois sources d'informations complémentaires: étude bibliographique, entretiens avec les acteurs, partenaires, anciens cadres du PSN-II et bénéficiaires, et observations de terrain. En fin de mission principale, une réunion de discussion a été organisée avec les partenaires techniques du programme et un Aide mémoire a été présenté aux Ministères concernés. Le premier projet de rapport a été discuté avec les partenaires dans la période de décembre 2006 – février 2007, suite à quoi le rapport d'évaluation a été finalisé.
Un Atelier national de conclusion de l'évaluation a été organisé le 17 mai 2007 à Niamey, regroupant les principaux partenaires du PSN-II afin de discuter par rapport aux modalités de mise en œuvre des recommandations de l'évaluation et d'établir les bases de cet Accord conclusif. Il reprend les recommandations principales de l'évaluation, en prenant en compte les propositions des participants à l'Atelier de conclusion, retenues par le Gouvernement du Niger représenté par le Ministre du développement agricole et le Ministère de l'économie et des finances, et par la Division Afrique de l'Ouest et du Centre du FIDA.
Constats principaux de l'evaluation
Identifié fin 1992, formulé dans la première moitié de 1994 et pré-évalué dans la première moitié de 1995, le PSN-II fût approuvé par le Conseil d'administration du FIDA en Septembre 1995. A cause de la suspension du portefeuille FIDA pour le Niger, le démarrage du projet a été reporté à 1998. Deux interruptions d'activités ont conduit à reporter la clôture du projet jusqu'à décembre 2004. L'objectif général du projet était de « rétablir de manière durable les conditions d'un développement équilibré basé sur l'exploitation optimale de toutes les ressources naturelles ». Le projet était mené à intervenir dans cinq des six régions du pays, sur des thématiques aussi diverses que l'agriculture irriguée (Tillabéri et Diffa), la gestion de terroirs villageois (Illéla, Loga, Ouallam et Diffa), la gestion des terroirs pastoraux (Tchintabaraden, Abalak et Tchirozérine) et le crédit rural (toutes les régions couvertes).
Les objectifs du PSN-II étaient pertinents par rapport aux politiques du Niger et à la stratégie de pays du FIDA, mais la stratégie d'intervention ainsi que les moyens de fonctionnement prévus se sont révélés faiblement réalistes et opérationnels, particulièrement au regard du contexte et des capacités offertes réellement par le dispositif. Des problèmes de gestion et d'organisation combinés à un dispositif très dispersé géographiquement et thématiquement ont aboutit à une faible efficacité et efficience du projet. Rapportés aux ambitions et aux moyens mobilisés, les impacts du PSN-II sont restés limités. A défaut d'une vraie réflexion stratégique et méthodologique sur la mise au point de démarches de réduction de la pauvreté, et dans l'absence d'une stratégie de ciblage adéquate, les composantes du PSN-II n'ont que faiblement réussi à satisfaire les besoins des plus démunis, notamment des femmes et des jeunes. La durabilité des acquis du projet aussi apparait globalement insatisfaisante faute d'une véritable stratégie de pérennisation des organisations et services mis en place. Le projet n'a pas su saisir les opportunités qui se présentaient pour transférer ses fonctions et capacités auprès des opérateurs privés ou publics ou pour engager des organisations pérennes1 .
En zone d'agriculture irriguée, le PSN-II a eu un impact sur la productivité agricole, grâce à la vulgarisation agricole et au meilleur accès à l'eau d'irrigation pour les exploitants des périmètres irrigués collectifs (PIC). Des travaux de réhabilitation des ouvrages du PSN-I ont été entrepris sur 2/3 des PIC prévus, mais ont accumulés beaucoup de retard. La vulgarisation agricole a profité à la majorité des exploitants et le taux d'adoption aurait atteint 80% pour plus de la moitié des thèmes techniques vulgarisés. Pourtant, des insuffisances ont été notées au niveau de la prise en compte des systèmes de production plus larges des exploitants, de l'accès aux marchés et de la sécurité foncière, des femmes en particulier. Ainsi, bien que le taux d'exploitation des PIC a certainement augmenté grâce au projet, on note un abandon progressif depuis sa fin. La promotion des organisations de producteurs a touché plus de groupements que prévu, mais le renforcement des capacités collectives en gestion, entretien et renouvellement des infrastructures est resté limité. Les recherches agronomiques menées à petite échelle en partenariat avec l'INRAN, ont donné quelques résultats intéressants, mais ont manqué de capitalisation et de diffusion.
En matière de Gestion des terroirs, les équipes ont beaucoup investi dans l'élaboration d'une démarche qui devait permettre aux populations de dégager un Plan de d'aménagement et de développement de terroir (PADT) à moyen terme et une organisation adaptée à la mise en œuvre de ce plan. A cause de lenteurs au démarrage et des différentes suspensions du portefeuille FIDA au Niger à cette époque d'instabilité politique, seulement 1/3 des PADT prévus ont pu être préparés et moins de la moitié de ces plans a pu être mise en œuvre. Les travaux de CES-DRS basés sur des techniques simples et adaptées aux capacités des paysans ont connu un véritable essor. L'application de tassas et cordons pierreux a par endroits accru de 30% les rendements des cultures, contribuant ainsi à l'accroissement des disponibilités céréalières des ménages disposant de terres. Il a été constaté une extension des aménagements de la propre initiative des populations. Les interventions du PSN-II en matière de protection d'environnement se sont basées sur de nouvelles approches, notamment en matière de Régénération Naturelle Assistée (RNA), qui ont permis de contribuer à l'accroissement de la biodiversité et la reforestation de la bande sahélienne nigérienne2. Pourtant, de manière globale, les impacts visés par le projet sur les systèmes de gestion des ressources communes sont restés faibles. La réalisation des infrastructures villageoises est restée en deçà des prévisions. Les actions de banques céréalières ont généralement eu peu d'effet sur le niveau de sécurité alimentaire des ménages les plus démunis. Dans les zones pastorales, les aménagements CES/DRS ont mobilisé les populations. La collaboration avec le PAM et l'approche « food for work » a permis une meilleure mobilisation des intéressées. Les liens sociaux ont été renforcés grâce aux concertations et échanges suscités par le projet. Le PSN-II n'a pas permis une reconnaissance des comités de développement des terroirs mais il est prévu que les communes rurales mises en place en 2004 prennent en charge ces prérogatives.
En ce qui est de la composante de renforcement des systèmes financiers ruraux, d'une manière générale, le renforcement des capacités des opérateurs de crédit a été insuffisant pour permettre à ceux-ci de poursuivre les activités de crédits auprès des populations démunies dans les zones d'intervention après la fin de leur contrat d'opération. Trois mécanismes de crédit ont été mis en place avec des objectifs, principes et opérateurs différents suivant les zones. Globalement, les modalités du partenariat avec les opérateurs de crédit ont pâti des différentes ruptures de trésorerie du PSN-II et d'une insuffisance de communication et de flexibilité. Seul le mécanisme II, facilitant le crédit à travers une mutuelle d'épargne et de crédit locale en zone de Diffa, a permis d'octroyer un volume de crédit assez important, principalement à court terme, avec un taux de recouvrement excellent. En zones pastorales, il a été noté un changement de comportement favorable à l'émancipation des femmes grâce à la création des caisses d'épargne et de crédit. Les bénéfices du microcrédit y ont prioritairement été réinvestis dans l'alimentation des ménages.
Recommandations approuvees par le gouvernement et le FIDA
Recommandation 1
Les projets de développement rural devraient être mieux ciblés dans l'espace et leur domaine thématique, en se basant sur les expériences capitalisées d'autres interventions et une bonne compréhension des enjeux sociopolitiques et des causes de la pauvreté/vulnérabilité. Concrètement, cela signifie que:
- Dans un contexte sociopolitique difficile comme celui du Niger, aux capacités locales limitées, il apparaît essentiel de mettre en place des projets (i) recentrés géographiquement, (ii) flexibles et évolutifs pour pouvoir monter progressivement en puissance au fur et à mesure que les expériences sont acquises, (iii) plus circonscrits aux champs thématiques jugés prioritaires du développement rural et de la lutte contre la pauvreté et les inégalités. Cette stratégie veut favoriser une véritable dynamique de développement, qui sera renforcée par les complémentarités et synergies fortes à mettre en place avec les autres projets et bailleurs de fonds.
- Une bonne compréhension des dynamiques sociales et économiques et des processus d'aggravation de la vulnérabilité et des inégalités dans les régions où l'on souhaite intervenir est un préalable indispensable à toute intervention. Afin d'approfondir les connaissances sur les mécanismes d'insécurité des plus pauvres, un document de travail spécifique à ce sujet sera dorénavant inclus dans les dossiers de formulation des projets. Des innovations en matière de méthode de ciblage et de suivi des impacts basées sur une identification participative des groupes pauvres et vulnérables au sein des communautés devraient être promues par les projets, puis évaluées et étendues par le Gouvernement, permettant d'élaborer une véritable stratégie opérationnelle centrée sur la sécurisation des groupes cibles bien définis.
- Une stratégie opérationnelle de capitalisation des expériences devrait être intégrée dans tous les projets. Les projets pourraient notamment contribuer au renforcement des centres de documentation du MDA afin de faciliter le partage d'expérience et les formulations de programme.
Recommandation 2
Dans le contexte actuel de la décentralisation le concept du faire-faire devrait évoluer3 de la prestation de services aux projets vers un véritable transfert des responsabilités de maîtrise d'ouvrage auprès des collectivités territoriales et organisations paysannes. Deux catégories de prestataires de service, de préférence locaux, devraient être soutenues, l'une catégorie pour assurer la maîtrise d'œuvre au niveau local et, l'autre, pour appuyer les maîtres d'ouvrage dans la planification et la gestion du développement local. Ainsi l'approche faire-faire permettrait non seulement de valoriser et de développer les capacités des prestataires, mais également de responsabiliser et de renforcer les capacités des structures publiques décentralisées et déconcentrés ainsi que les organisations de base. Cette évolution de l'approche ne peut pourtant donner fruit que si un nombre de conditions sont remplies. Concrètement, le Gouvernement et le FIDA, à la conception des projets, devraient prévoir:
- des mécanismes d'appui-conseil à la maîtrise d'ouvrage décentralisée (par les régions, communes, OP) afin de leur permettre de négocier, de gérer et de suivre des contrats avec prestataires de préférence locaux, qui incluent un cahier des charges précis, avec des indicateurs de résultats vérifiables et consensuels
- un accompagnement à la mise en place de services, notamment municipaux tel que prévue dans les textes, permettant un exercice réel et durable de leur maitrise d'ouvrage avec une forte implication des bénéficiaires
- des mesures et moyens pour renforcer les capacités techniques et de gestion des prestataires locaux couplés à une forte responsabilisation des prestataires dans la réalisation des services
- des procédures financières adaptées, garantissant aux opérateurs locaux de disposer des moyens nécessaires en temps opportuns, tout en permettant un déblocage progressif des fonds aux prestataires en fonction des résultats atteints.
Recommandation 3
Dans les contextes institutionnels difficiles, aux capacités budgétaires et de personnels limités, il est nécessaire de renforcer les capacités des exécutants de projet, et d'améliorer le suivi et la supervision des projets. A ces fins:
- Le FIDA et le Gouvernement devrait prévoir, dans la conception des projets, une assistance technique de qualité pour renforcer les capacités de coordination, méthodologiques et techniques du personnel des projets. L'assistance technique devrait être conçue et évaluée comme un programme de transfert progressif des capacités aurès des cadres des projets.
- Un budget devrait être systématiquement prévu dans les projets afin de permettre une participation régulière du Ministère de tutelle à toutes les missions de supervision de terrain. Le Ministère de tutelle, responsable d'assurer la mise en œuvre des recommandations des supervisions, devrait désigner un cadre permanent en tant que point focal du projet. Ce cadre, chargé du suivi des dossiers du projet, devra notamment assurer le suivi de la mise en œuvre des recommandations des supervisions. Une présence accrue du FIDA dans le pays devrait également contribuer au renforcement du suivi opérationnel des projets, permettre une intermédiation entre partenaires quand cela s'avère nécessaire, et promouvoir la capitalisation des acquis dans les projets et vers l'extérieur.
Recommandation 4
Trois importants défis doivent être relevés pour poursuivre le développement de l'agriculture irriguée, qui reste pertinente au Niger autour des ressources en eau de surface, à savoir:
- L'accès aux marchés. Parce que l'intensification de l'agriculture irriguée engendre des coûts importants pour les agriculteurs (engrais, pesticides, carburant, frais de réparation des infrastructures etc.), celle-ci n'a qu'un sens dans la mesure où des opportunités d'écoulement des produits à des prix rémunérateurs existent et peuvent être exploitées par les irrigants, sans ou avec un appui-conseil spécifique en provenance des services techniques publics ou de projets.
- La sécurité foncière des exploitants. Celle-ci doit dans tous les cas être garantie dans la durée avant de passer à des investissements hydro-agricoles, à travers l'accompagnement d'un processus de négociation et de formalisation d'accords fonciers à long terme. Le Gouvernement devrait considérer l'enregistrement de la propriété de la terre auprès des Commissions foncières comme la priorité, qui permettra en suite la mise en place d'un système de fermage formel. Le FIDA devrait prévoir lors de la mise en œuvre des projets, des études préalables et des appuis technique dans le domaine de la sécurisation foncière afin de faciliter l'atteinte de ces objectifs.
- L'intégration du développement des cultures irriguées dans un schéma plus large de planification et de gestion villageoise des ressources naturelles. Les modèles de développement de l'agriculture irriguée retenus doivent s'appuyer sur un processus de diagnostic et de planification local, prenant en compte l'ensemble des systèmes de production existants du village et en cohérence avec les Schémas d'aménagement foncier.
Recommandation 5
Parce que le développement des zones pastorales constitue un vrai enjeu pour l'avenir et la cohésion du pays, deux axes centraux sont à développer:
- L'amélioration de la gouvernance de la gestion des ressources pastorales: elle constitue un enjeu important pour une gestion plus durable des ressources naturelles, mais aussi en ce qui concerne la prévention des conflits. Les démarches de concertation des usagers et des acteurs locaux (COFOs, communes, autorités traditionnelles et organisations d'éleveurs et d'agriculteurs, administration locale) doivent être promues par le Gouvernement du Niger et par le FIDA. Ces concertations doivent déboucher sur la définition de règles pertinentes et reconnues en lien avec les schémas d'aménagement foncier. Ce type de démarche de gestion et d'aménagement concertés trouve sa place dans des contextes aussi variés que les zones pastorales, agro-pastorales et agricoles, l'élevage étant amené à emprunter ces différentes zones suivant les saisons.
- Stratégies de prévention des crises par les éleveurs: Pour limiter les effets des sécheresses récurrentes et faciliter la reconstitution de l'économie familiale, le Gouvernement et les projets de développement de l'élevage devraient appuyer les pasteurs à élaborer des stratégies de sécurisation de leur troupeau (sécurisation de la mobilité, commercialisation anticipée en prévention des crises, stockage de céréales individuel, magasins pour aliment du bétail pour les petits éleveurs, appui à l'innovation par les pasteurs en matière de reconstitution du cheptel pour les plus démunis au sortir des crises etc.).
Recommandation 6
L'exécution des composantes crédits des projets doit s'appuyer sur les institutions de micro finance existantes et exige une stratégie spécifique de renforcement des capacités allant bien au-delà d'un simple partenariat d'exécution.
- Les projets doivent accompagner la logique de services financiers ruraux pérennes dans laquelle s'inscrivent les opérateurs spécialisés et les bénéficiaires. La mise en œuvre d'une composante « crédits » des projets ne peut pas être considérée comme un simple outil permettant de soutenir ponctuellement et rapidement des initiatives économiques rentables, en parallèle aux subventions aux investissements.
Une importance particulière doit être accordée au renforcement des capacités institutionnelles et organisationnelles des opérateurs spécialisés afin qu'ils soient en mesure d'assurer la poursuite des activités après le projet.
1/ Il est à noter que la décentralisation n'a été mise en œuvre que depuis 2004 au Niger. Par conséquence, le transfert aux communes de la maitrise d'ouvrage du développement local n'était pas encore envisageable au cours du projet.
2/ Le retour de la végétation arborée dans le Sahel depuis le milieu des années 1980 a été constaté sur la base de l'analyse diachronique de photos aériennes ou satellitaires (étude Chris Reij) ainsi qu'à travers différentes enquêtes et études menées notamment par les universités de Louvain et Amsterdam.
3/ La recommandation 3 du rapport d'évaluation est, selon le Gouvernement et le FIDA, centrée sur un concept du faire-faire trop restreint (le faire exécuter de certaines fonctions du projet par des prestataires de services). Le Partenariat clé de l'évaluation a souhaité, dans le cadre de la décentralisation, d'élargir le concept du faire-faire à un véritable transfert de responsabilités auprès des acteurs locaux.