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Rural Micro-Enterprises Project (2004)

06 décembre 2004

Évaluation intermédiaire

Le Projet de promotion des micro-entreprises rurales (PROMER) a démarré ses activités en juin 1997. Son coût total s’élève à 10,94 millions de USD dont 67% sont couverts par les prêts du FIDA (n° 402-SN et SRS-47-SN). Sa durée initiale, de six ans, a été prolongée de deux années, courant 2002, sans apport budgétaire complémentaire. La date de clôture des prêts du FIDA est fixée au 31 mars 2005. Une éventuelle seconde phase est envisagée par le gouvernement et le FIDA suite à l’évaluation du programme FIDA au Sénégal conduite en 2003 et aux axes d’intervention prévus dans le COSOP. Dans cette perspective, le Bureau de l’évaluation (OE) du FIDA, conformément aux procédures en vigueur, a mené une évaluation intermédiaire du PROMER.

Elle avait pour objectifs, selon une démarche d’évaluation conjointe et partenariale, de : i) juger de l’adéquation, de l’efficacité et de la durabilité des actions entreprises par le PROMER, ii) comprendre, estimer, et si possible mesurer les impacts des réalisations du projet, ainsi que les changements induits, iii) apprécier la dynamique actuelle des changements induits et leur perspective de durabilité, et iv) tirer de cette analyse les enseignements utiles et les recommandations pour l’avenir.

La mission d’évaluation1 a séjourné au Sénégal du 25 janvier au 18 février 2004. Elle a facilité une auto-évaluation de l’équipe du PROMER, et procédé à des visites de terrain2, des rencontres avec les partenaires impliqués ou non dans la mise en œuvre du projet et à la tenue d’un atelier de restitution et d’échanges à Kaolack autour des constats préliminaires.

Contexte, conception et évolution du projet

Le PROMER s’inscrit dans un contexte de désengagement de l’État et d’encouragement du secteur privé formel ou informel à prendre en main les activités productives et commerciales. La micro-entreprise s’est alors révélée être un moyen pouvant permettre de réduire la pauvreté en milieu rural. Les activités non agricoles de transformation et de services représentent une alternative à l’exode rural pour les jeunes et offrent aux femmes la possibilité de mener des activités rémunératrices, notamment des activités productives pouvant valoriser leur savoir-faire.

Le PROMER vise donc le développement de micro-entreprises non agricoles en milieu rural sur quatre régions du Sénégal : Tambacounda et Kolda, dans un premier temps, avec une extension à Kaolack et Fatick à mi-parcours. Ces quatre régions, touchées par la crise arachidière et le déplacement de la zone cotonnière, représentent environ 51% du territoire national et une population de l’ordre de deux millions d’habitants. Tout en disposant de ressources agropastorales, elles présentent un isolement et un sous-développement chronique, particulièrement pour Tambacounda et Kolda.

Les objectifs du PROMER étaient ainsi définis :

  • Créer de nouveaux emplois saisonniers ou permanents rémunérateurs et, par voie de conséquence, améliorer les revenus des familles rurales pauvres;
  • Augmenter la production de biens et services de qualité à travers la valorisation des productions agricoles locales ;
  • Allonger la période du travail productif annuel au-delà de la période des travaux agricoles ;
  • Réduire l’exode rural grâce aux opportunités de travail pour les jeunes.

Les groupes cibles du projet devaient être constitués par des individus ou des groupements porteurs d’initiatives économiques (PIE). Les femmes et les jeunes devaient être des groupes prioritaires et les couches les plus pauvres de la société étaient particulièrement visées par l’appui à la création de micro-entreprises devant représenter 70% des micro-entreprises rurales (MER) appuyées. En termes quantitatifs, le groupe cible était estimé à 4 000 personnes dont 30% bénéficieraient des appuis du projet, soit 1 200 micro-entreprises à 50% détenues par les femmes. Environ 1 000 d’entre elles devaient bénéficier d’un financement pour un montant total de l’ordre de 800 millions de FCFA et 200 de formations uniquement. Les emplois attendus étaient estimés à environ 3 000.

La mise en œuvre devait adopter une démarche progressive et développer un mode d’intervention faisant largement appel à la sous-traitance (le faire faire). L’intervention était prévue sur deux régions dans un premier temps : Tambacounda et Kolda, avec une extension, à mi-parcours.

Pour atteindre ses objectifs, la mise en œuvre du PROMER repose sur les effets conjugués de deux composantes principales : i) appui au développement des MER, et ii) financement des MER dont la mise en œuvre est confiée à une institution de microfinance, le CMS, co-bailleur du projet3. Une troisième composante permet d’assurer le suivi et la gestion du projet.

Placé sous la tutelle du Ministère de l’agriculture et de l’hydraulique, le PROMER est supervisé par un Comité de pilotage. L’Unité de gestion du projet (UGP) relativement légère est complétée, dans chacune des quatre régions d’intervention, par une cellule régionale4.

À partir de la revue à mi-parcours, menée par l’institution coopérante, la Banque ouest-africaine de développement (BOAD), le projet a procédé à un recentrage majeur de ces interventions qui s’est traduit par l’abandon des appuis aux MER ayant des activités à prédominance de commerce et d’embouche, l’introduction d’une approche par filières dites « structurantes », la diversification des partenariats dans le domaine du financement et le recadrage des missions des agents d’animation économiques polyvalents (AEP) en conseillers d’entreprises.

Les résultats de la mise en oeuvre

Après environ six ans d’activités, au 31 décembre 2003, un montant total de 3,780 milliards de FCFA a été décaissé sur un montant prévisionnel de 5,252 milliards de FCFA, soit un taux de décaissement de 71,97%. Il y a lieu de souligner que le gouvernement a régulièrement assuré sa contrepartie et a, par ailleurs, doublé sa contribution au financement du projet notamment pour le volet formation.

Le PROMER affiche un portefeuille total de 1 359 MER dont 683 créations, soit 50,26%, et 676 MER consolidation réparties dans 675 villages avec une dispersion importante5 . 33% sont des groupements à 74% féminins. Les femmes constituent 45% des promoteurs de l’ensemble des MER et les jeunes 26%.

On relève une assez grande diversité d’activités, avec quelques dominantes que sont la boulangerie, 12% des MER, la production de savon, 11% des MER, le commerce divers (11%). Le groupe de filières métal mécanique ne représente que 10% du portefeuille.

De plus, 1 039 MER, soit 76%, sont, à ce jour, considérées comme opérationnelles. 65% de ces MER opérationnelles, soit 672, sont actuellement suivies par les AEP.

Les emplois créés et consolidés s’élèveraient au total à 3 630 dont 1 888 créations et 1 742 consolidations, soit, en moyenne, 1,4 emploi dans les MER individuelles créées et 1,6 emploi dans les MER consolidées. Les MER au statut de groupement totalisent à elles seules 2 514 emplois, soit 69% de la totalité des emplois considérés et 83% des emplois créés. Dans ces groupements, il convient de distinguer les emplois correspondant à la participation des membres aux activités collectives6 que la mission a dénommé « équivalents emplois » de ceux qui correspondent à des emplois salariés rémunérés. Selon ces caractéristiques, la mission estime que les emplois créés et consolidés à ce jour seraient plutôt de l’ordre de 1 5007.

Les secteurs les plus pourvoyeurs d’emplois (hors équivalents emplois) semblent être selon le nombre moyen d’emplois par unité : transformation des céréales et transport (2,1), restauration (2,3), vannerie/menuiserie (2,6), menuiserie métallique (2,7), pêche (3,1), tourisme (3,3).

Les formations constituent le principal outil de renforcement des capacités et compétences utilisé par le PROMER. Ainsi, 943 MER ont bénéficié d’au moins une formation, soit 69% de l’ensemble des MER pour 2 213 participants, hors alphabétisation. 64% des participants ont bénéficié de formations techniques, une partie d’entre elles ont été dispensées par des artisans formateurs, et 36% de formations transversales (esprit d’entreprise, GERME…). Les femmes constituent 55% des bénéficiaires des formations. Les formations en alphabétisation fonctionnelle ont concerné un total de 2 226 personnes dont 82% de femmes. Moins d’une personne formée sur deux (47%) aurait mis en œuvre les formations. L’accès au financement pour l’achat d’équipement semble avoir constitué une contrainte importante à l’application des formations techniques.

Les autres appuis non financiers ont principalement concerné :

  • les appui-conseils délivrés par les AEP. Sur les trois dernières années, ils auraient effectué 13 076 visites aux PIE/MER, soit une moyenne mensuelle de 16 visites effectuées par chaque AEP8 pour un portefeuille actif moyen de 28 MER. L’intensité du suivi n’est pas identique pour toutes les MER, une quinzaine, par AEP, bénéficierait d’un suivi plus régulier à raison de deux visites mensuelles. Il s’agirait des MER facilement accessibles et proches du lieu de travail de l’AEP.

  • les appuis commerciaux ont porté, entre autres, sur la recherche des marchés, la visibilité des MER et le conditionnement des produits. La quantification précise et cumulée de ces appuis n’est pas connue, de même que les résultats engendrés. Le projet a, par ailleurs, soutenu la participation de certaines MER aux foires commerciales et a, en février 2003, organisé sa première édition de la Caravane des initiatives qui a enregistré la participation permanente de 12 MER et 5 000 visiteurs. En 2003, les actions ont été concentrées sur la création de deux boutiques de MER. Ces boutiques sont promues en perspective du retrait du projet et de la nécessaire pérennisation des MER.

  • les appuis techniques ont visé l’amélioration des procédés traditionnels de production et l’appui à l’installation d’unités de production, notamment pour les MER de transformation de produits agricoles et forestiers. Sept filières ont été concernées par l’adaptation d’équipement, plusieurs filières ont aussi bénéficié de l’amélioration des itinéraires techniques. Un Centre d’information de documentation et démonstration (CIDD) a été installé en 2002. Le projet a, par ailleurs, mis en place, au cours de l’année 2003, deux outils devant permettre au projet d’assumer une partie du risque pour les innovations technologiques introduites (en matière d’équipements ou d’emballages) : le Fonds d’appui technologique (FAT) et la Convention d’appui commerciale (CAC). Des Associations socioprofessionnelles (sept sont recensées) ont été encouragées ou promues sous l’impulsion du projet à partir de l’année 2000, le degré d’autonomie de ces organisations est encore loin d’être satisfaisant.

En ce qui concerne les appuis financiers, le projet a, d’une part, contribué au renforcement des capacités des institutions partenaires, et, d’autre part, accompagné les micro-entrepreneurs pour l’obtention d’un crédit ou la constitution d’un autofinancement.

Si l’accord de rétrocession de la ligne de crédit et le protocole d’accord ont bien été signés avec le CMS, la ligne de crédit n’a jamais fait l’objet d’appels de fonds de la part de cette institution. Cependant, le fonds de risque devant couvrir une partie des pertes sur crédits9 a été mobilisé à deux reprises et le CMS a été doté de quelques équipements. Le CMS n’a pas procédé à l’ouverture des 10 nouvelles caisses prévues mais a plutôt au cours du projet procédé à la fermeture de certaines caisses ou à leur transformation en points de service. Cette situation a conduit le PROMER à s’ouvrir à de nouveaux partenaires. Deux nouveaux accords subsidiaires et protocoles d’accord ont ainsi été signés en 2003 avec l’Alliance pour le crédit et l’épargne pour la production (ACEP) et l’ Union des mutuelles d’épargne et de crédit de Sédhiou (UMEC) qui ont bénéficié d’une dotation en équipements. La répartition de la ligne de crédit devant être rétrocédée, à hauteur de la mobilisation, se présente donc comme suit : CMS (60% des 520 000 DTS, soit 312 000 DTS), ACEP (30%, soit 156 000 DTS) et UMEC (10%, soit 52 000 DTS). Ces deux dernières institutions avaient, à fin 2003, effectué un premier appel de fonds et mobilisé le fonds de risque. Le projet a aussi signé des protocoles d’accord avec quatre institutions de microfinance (IMF) d’implantation locale et mis à leur disposition certains équipements (motos ou équipement informatique).

Sur le base de ces différents partenariats, 770 MER ont obtenu au moins un crédit, soit 57% des MER du portefeuille total, pour un montant total de 265,3 millions de FCFA correspondant à 983 prêts. De plus, 1 422 comptes ont été ouverts auprès des services financiers décentralisés (SFD) partenaires et 1 011 plans d’épargne ont été élaborés. Les femmes ont bénéficié (MER individuelles et groupements) de 37% des montants alloués et de 46% du nombre de crédits accordés. Les groupes de filières «transformation des produits agricoles et forestiers» et «services et autres» ont majoritairement bénéficié des financements, respectivement pour 35,1% et 42,6%.

Malgré l’absence de mobilisation de la ligne de crédit, le CMS a accordé 84% des crédits en volume et 88% en nombre, l’ACEP a accordé 9% des volumes de crédit et 4% du nombre total. Environ 129 MER, dont certaines ont bénéficié d’un crédit, auraient, par ailleurs, participé à l’autofinancement de leur équipement (aménagement du local, équipement divers de coûts très variables…).

Il y a lieu aussi de relever que le PROMER a favorisé l’émergence d’un nouveau métier au travers de 24 conseillers en entreprise qui pourront ainsi à titre privé et/ou dans le cadre d’une seconde phase du PROMER participer activement à l’accompagnement des micro-entreprises rurales, de même que les cadres du projet.

Efficacité de la mise en œuvre et adéquation des méthodes

Les objectifs quantitatifs prévus en ce qui concerne le nombre de MER en portefeuille ont été atteints. Ceux relatifs aux formations le sont partiellement. Par contre, compte tenu des outils financiers disponibles, les objectifs relatifs à la création d’emplois, notamment pour les jeunes, apparaissent ne pas être atteints, de même en ce qui concerne l’accès au financement des MER. L’introduction de nouveaux équipements et de procédés innovants est à souligner positivement et constitue un des acquis importants du PROMER.

D’une manière générale, l’équipe du projet a été volontariste et engagée dans sa mission. On note un fonctionnement d’ensemble du projet satisfaisant et l’atteinte de résultats significatifs en matière de définition de stratégie d’intervention et de test de différents outils. Cependant, certains de ces outils s’apparentent davantage à des actions de promotion plutôt que de pérennisation (caravane, CIDD). D’autres comme la CAC, le FAT et les MER de référence sont au stade actuel davantage des outils de recherche/action, d’adaptation technologique et de démonstration dans certaines filières porteuses. Il apparaît pertinent qu’il s’agit de voies de pérennisation à moyen terme mais cette démarche ne touche actuellement qu’un nombre restreint de MER ; ce qui en limitera l’interprétation.

On relève que le projet s’est parfois substitué aux MER dans certaines fonctions en associant et responsabilisant de manière insuffisante les MER ou leurs organisations : recherche et contractualisation de marché d’approvisionnement et de vente, gestion de trésorerie.

En ce qui concerne les appuis financiers, pour le financement des équipements à moyen terme, le projet a été confronté à l’absence de produits financiers adaptés au niveau du CMS. Cette carence n’a pas permis d’atteindre certains des objectifs visés. La stratégie initiale prévue en matière d’outils financiers apparaît inadéquate : les conditions d’entrée et d’accès au crédit, y compris l’éloignement des services de la principale institution partenaire, sont d’emblée éliminatoires pour une partie du public cible, en particulier les jeunes sans emplois et les femmes démunies. Ces outils visaient à sécuriser les institutions partenaires et surtout à mettre à leur disposition des ressources pour l’octroi des crédits mais l’on ne s’est pas intéressé aux capacités du public cible à répondre aux conditions imposées par ces institutions. Par ailleurs, si la gestion du financement était effectivement externalisée auprès des SFD, l’essentiel des autres fonctions (information, montage des dossiers, voire suivi du recouvrement) a été assumé par les AEP au détriment des fonctions essentielles de conseil.

L’approche de la mesure de l’efficience, s’agissant d’un projet pilote, doit se faire avec prudence, certains ratios mettent en évidence des résultats très inégaux mais pour certaines MER le retour sur investissement est très rapide ; elles peuvent générer un résultat d’exploitation supplémentaire deux fois supérieur aux coûts moyens d’accompagnement (directs et indirects).

Les impacts enregistrés

La mission a pu mettre en évidence des impacts diversifiés localisés à plusieurs niveaux d’observation (MER, ménage, village, communauté rurale) et impliquant des domaines différenciés (économique, social…).

D’une manière très globale, des impacts positifs, voire très impressionnants, sont relevés pour un certain nombre de micro-entreprises qui ont bénéficié d’appuis conséquents. Les effets sont observés tant au niveau des volumes de biens et services produits que du chiffre d’affaires réalisé. On enregistre des cas où le volume d’activités a doublé (parfois triplé) en l’espace d’une année d’activités. Les impacts sont fortement liés à l’intensité et à la durée de l’accompagnement des MER. Toutefois, les impacts demeurent modestes à l’échelle de l’économie locale. Les revenus supplémentaires dégagés, en particulier par les femmes entrepreneurs, sont affectés en priorité à l’amélioration de l’alimentation de la famille, environ 1 350 ménages ont pu être concernés par cet impact. Lorsque les surplus sont significatifs, ils sont investis dans l’accroissement du capital productif de l’exploitation familiale et notamment pour la production agricole et la diversification des activités non agricoles. Ce qui permet ainsi une meilleure sécurisation des ménages concernés, un meilleur accès aux soins de santé primaire, dans une moindre mesure, une scolarisation plus importante des enfants et une amélioration des conditions de vie. Potentiellement, 860 ménages ont pu enregistrer des changements à ce niveau. On enregistre une réduction de la pénibilité du travail des femmes grâce aux équipements de transformation introduits, on peut estimer qu’environ 2 000 personnes, toutes catégories confondues, ont pu bénéficier de cet impact dans la zone du projet. Les compétences acquises au niveau professionnel ont aussi permis un impact sur les ressources humaines. La réussite économique de certains promoteurs les amène à jouer un rôle social plus important au sein des instances du village et, dans quelques rares cas pour ceux qui ont le mieux réussi, ils s’impliquent dans les instances de développement local de la Communauté rurale en mettant au service de cette communauté leurs capacités renforcées et leurs ressources (financement de cantines scolaires, aménagement des écoles…). Les impacts en termes d’environnement peuvent être qualifiés de mineurs et d’indirects dans la plupart des types de MER.

L’appropriation et la diffusion de certaines innovations technologiques, telle que le four amélioré pour les boulangeries, semblent acquises. Par contre, d’autres innovations sont encore en expérimentation (presse à karité, presse améliorée pour l’extraction d’huile d’arachide…). Pour celles-ci, il n’est pas possible, actuellement, de se prononcer sur leur éventuelle adoption.

Au stade actuel et d’ici à la clôture du projet, on ne peut affirmer que l’ensemble des MER actuellement opérationnelles soient engagées dans la voie de la durabilité, en raison, notamment, d’un accompagnement insuffisant dans la durée et insuffisamment responsabilisant et participatif. De ce fait, les impacts et effets globaux enregistrés sont limités. Si les impacts mis en évidence sont très significatifs pour une partie des MER mais globalement relativement limités, dans le cadre d’une phase pilote, ils permettent surtout d’apprécier l’impact de la méthodologie et tout l’intérêt d’une démarche qui associe formation/appui-conseil et accès au crédit.

Principales leçons à tirer de l’expérience

Le recentrage, intervenu avec la revue à mi-parcours, a permis de prendre en compte des secteurs d’activités qui avaient été insuffisamment appuyés jusqu’alors. Cependant, l’abandon systématique des activités de commerce et d’embouche n’était pas judicieux quant à l’objectif de toucher un public démuni pour lequel ces activités sont génératrices de revenus et peuvent constituer un levier pour amorcer à terme des activités plus structurantes. Les activités de commerce peuvent aussi accompagner le développement des activités de production en favorisant la commercialisation. De ce fait, les types d’activité visés, les conditions d’accès au crédit et l’insuffisante proximité des services financiers, dans certaines zones, ont constitué des facteurs discriminants pour le public prioritaire ciblé ; à savoir les femmes et les jeunes n’exerçant pas d’activités non agricoles.

Le partenariat privé et associatif a été actif, dense et diversifié, ce qui a permis d’exécuter, dans un temps relativement court, un programme de travail ambitieux, étendu géographiquement et sectoriellement, même si l’on peut regretter des contenus de protocoles de collaboration trop uniformes ne permettant pas toujours de tirer le meilleur parti des spécificités de chaque partenaire.

Le choix d’une intervention sur l’ensemble des quatre régions présentait un intérêt certain pour le caractère pilote de l’opération et la diversité des potentialités et types d’activités mais aurait pu être restreint dans chacune des régions à des pôles de concentration d’activités économiques sans que cela ne remette en question le choix de la cible prioritaire du projet. Ceci aurait pu éviter l’effet de « saupoudrage » qu’a observé la mission et réduire ainsi les coûts opérationnels.

L’expérimentation en cours depuis 2002 sur les filières dîtes « structurantes » s’avère porteuse d’enseignements intéressants et capitalisables pour le futur. Cependant, les marchés d’approvisionnement et de vente de proximité ont été peu exploités alors qu’ils concernent la quasi-totalité des MER du portefeuille et présentent des contraintes à lever. Dans son appréhension des MER, le PROMER semble adopter une démarche sectorielle plutôt que filière. Les appuis sont focalisés sur des MER remplissant, seules ou presque, la quasi-totalité des fonctions (approvisionnement - production – vente). Ils concernent peu ou pas les micro-entreprises se situant en amont et/ou en aval des MER appuyées. Cette stratégie, qui semble s’inscrire dans une vision d’évolution des MER touchées vers de petites entreprises formelles et de taille conséquente visant à couvrir les marchés à forte valeur ajoutée et la distribution moderne, contribue à limiter l’impact du projet et le rôle moteur de certaines MER.

Si les outils de pérennisation choisis par le projet (CAC, FAT, boutique des MER) apparaissent pertinents, leur expérimentation dans le temps imparti (d’ici à la fin de la phase actuelle du PROMER) et au rythme de mise en place observé ne pourra, cependant, pas permettre d’apprécier leur adéquation avec l’objectif de pérennisation visé. Il serait donc souhaitable, à l’avenir, de pouvoir tester et d’asseoir les bases de la pérennisation de ces outils en situation réelle avec une approche complètement participative et responsabilisante.

La mission relève que la stratégie de désengagement du projet et de pérennisation des fonctions d’appui/conseil aux MER n’a pas été suffisamment approfondie au moment de la conception du projet et n’a pas fait l’objet au cours de projet d’une réflexion approfondie qui aurait permis de tester une ou des options dans le cadre d’une opération expérimentale.

Les erreurs et insuffisances de conception du système de suivi-évaluation durant toute la période du projet, ajouté à l’instabilité du personnel de ce service, n’ont, par ailleurs, pas permis d’optimiser le pilotage des interventions du projet. Ces insuffisances ne permettent pas au stade actuel de capitaliser au mieux les expériences acquises et une bonne mesure des impacts.

Principales recommandations

La mission confirme la pertinence de la poursuite de l’expérience dans le cadre d’une seconde phase du PROMER, notamment dans la zone actuelle du projet, qui se justifie eu égard : i) à la pertinence de l’objectif général de l’intervention, ii) aux premiers impacts positifs relevés, iii) à la durée trop restreinte de l’expérimentation actuelle dont les acquis sont encore à consolider ; l’essentiel des activités actuelles du PROMER est encore en chantier, iv) à la nécessité de définir et de mettre en place un service pérenne d’accompagnement des MER, et v) à l’inadaptation des outils financiers qui a exclu nombre de porteurs d’initiatives potentiellement viables.

La poursuite de cette expérience devrait maintenir la stratégie générale développée qui vise le triptyque formation/accompagnement (appui conseil)/crédit à l’endroit des MER et avec une externalisation de la fonction de financement. L’approche à adopter en direction des porteurs d’initiatives ou entreprises existantes ne devrait pas être exclusive quant aux différents types d’entreprises à appuyer que ce soit en termes de secteurs d’activités ou de taille. Elle devrait être différenciée en fonction du type d’entreprises : micro-entreprise unipersonnelle ou de type artisanal ou encore entreprise ayant vocation et un potentiel d’évolution vers la petite et moyenne entreprise (PME). La mission estime que les interventions de la seconde phase ne devraient pas être dirigées exclusivement vers la PME au risque d’exclure, directement ou indirectement, les catégories pauvres des communautés concernées. Les actions à mettre en place devront, parallèlement à l’appui ciblé sur des MER intervenant à un niveau donné d’une filière, favoriser l’allongement des filières concernées, notamment en nombre et diversité d’acteurs intervenant dans la filière ou des filières contiguës et interdépendantes.

Sur la question de la localisation des interventions, les acquis du projet et d’autres interventions au Sénégal tendraient à privilégier une approche pragmatique qui ne doit pas opposer localisation « villageoise » et « chef-lieu de département ». Le positionnement géographique de l’intervention dans une région doit être raisonné sur la base de la combinaison d’un certain nombre de critères minimum : disponibilité des matières premières, accessibilité, présence effective ou potentielle de services financiers et perspective de rentabilisation d’un service d’appui/conseil par l’existence d’un potentiel de développement d’activités économiques.

Les zones d’extension des activités du PROMER, au cours d’une seconde phase, devront correspondre aux zones d’intervention des autres projets financés par le FIDA en vue d’une maximisation des complémentarités et synergies qui nécessitera une coordination efficace des interventions. Cependant, il convient de souligner que l’expérience du PROMER est encore jeune, les différents outils méthodologiques restent encore pour l’essentiel à valider, aussi l’extension de la zone d’intervention du projet devra se faire avec prudence. Une extension du projet à l’ensemble du territoire national apparaît prématurée.

La question du financement est centrale dans la problématique d’émergence et de consolidation des MER, il apparaît donc judicieux et important que le PROMER puisse intégrer une composante spécifique pour les questions liées à l’accès au financement des publics ciblés. Par ailleurs, si la seconde phase du PROMER a vocation à intervenir sur des zones couvertes par les autres projets financés par le FIDA, la mission recommande que la seconde phase du PROMER puisse intégrer un service d'assistance technique aux projets sur la question du “financement”. Ce service pourrait être délivré par une cellule interne disposant des compétences requises mais l’option d’une contractualisation avec un organisme externe spécialisé devrait être privilégiée. L’intervention d’une assistance technique internationale pourrait ponctuellement compléter le dispositif.

Un des objectifs de la seconde phase devra concerner la création d’un service pérenne de conseil à la micro-entreprise rurale. Le processus de désengagement et d’autonomisation de ce service devra être prévu dès la conception du projet et planifié dans le temps. Par ailleurs, dès le départ, le principe d’une facturation progressive des services, notamment pour les fonctions commerciales et de formation que les entrepreneurs semblent prêts à assumer lorsque les services sont de qualité et les impacts positifs évidents, devra être adopté de manière modulée. Il n’en demeure pas moins que la question de la prise en charge de la totalité des coûts de tels services d’accompagnement ne peut relever exclusivement des bénéficiaires mais devra aussi être réfléchie sous l’angle de la subvention et sur la durée, notamment dans le cadre de contributions de l’État et des collectivités locales.

Enfin, il conviendra, dès le démarrage, de construire un système de suivi-évaluation et d’indicateurs pertinents. À ce titre, les indicateurs de suivi-évaluation devront prendre en compte l’ensemble des caractéristiques de la MER. Les audits annuels portant sur les aspects comptables, financiers et de procédures devraient pouvoir aussi intervenir sur le système d‘information interne.


1/ La mission d’évaluation intermédiaire était composée de Mme Corinne Riquet, économiste, Chef de mission, M. Bertrand Guibert, Agronome, et de M. Nguala Luzietoso, économiste. M. Bakhayokho et Kane, Conseillers techniques auprès de Monsieur le Ministre de l’agriculture et de l’hydraulique ont également participé à cette mission et représenté, à ce titre, le Ministère dans cet exercice. M. Bakhayokho accompagnait aussi la mission en qualité de Président du Comité de pilotage du PROMER. Les responsables du PROMER ont, par ailleurs, accompagné la mission et enrichi les discussions et multiples échanges de façon permanente.
2/ 78 MER au total de 52 villages ont été visitées.
3/ Le Crédit mutuel du Sénégal (CMS) devait cofinancer à hauteur de 50% la ligne de crédit destinée au financement des MER.
4/ Les cellules régionales interviennent sur des unités géographiques d’interventions appelées ZAEP (zone d’animation économique polyvalente) couvrant de cinq à six communautés rurales. Chaque ZAEP est encadrée par un AEP en contact direct avec les micro-entrepreneurs.
5/ 64% des villages touchés abritent une seule MER.
6/ Les membres des groupements exercent dans la majorité des cas une activité non agricole à titre individuel et consacrent un temps limité aux activités collectives du groupement.
7/ Cette estimation ne tient pas compte des « équivalents emplois » des filières dans lesquelles les groupements sont majoritairement féminins.
8/ On ne dispose pas de la distinction entre les visites aux MER en portefeuille et celles effectuées aux PIE en cours de sélection.
9/ Ce fonds de risque alimenté par une dotation du projet, à fonds perdus, couvre 4,5% des montants des crédits mis en place (soit 30% du risque qui est estimé à 15% du montant du crédit réellement octroyé (les 70% sont à la charge de l’institution), soit un taux de remboursement attendu de 85%).

 

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