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Projet d’appui aux petites exploitations de Basse Guinée Nord

14 septembre 2003

Évaluation intermédiaire

Introduction

La présente mission d'évaluation intermédiaire - obligatoire dans le cadre de la politique du FIDA - avait pour but d'évaluer, si l'ensemble des résultats obtenus ainsi que les impacts sur les populations cibles avait été suffisant pour justifier une continuation ou si l'approche prévue initialement doit être revue et modifiée. Et, dans l'affirmative, émettre des propositions de restructuration des activités ou des volets actuellement en place.

La mission d’évaluation était d’autant plus importante que le projet se trouvait dans une situation financière pénible du fait de l'augmentation des réalisations des infrastructures routières. En effet, lors de la mission, le projet ne pouvait plus faire face à ses engagements vis-à-vis des entreprises prestataires de services.

Déroulement de la mission et méthodologie

La mission a démarré le 22 janvier avec un briefing de deux jours au siège du FIDA, à Rome. Elle est arrivée à Conakry le 24, où elle a eu des séances de travail avec les cadres du projet et les responsables de tutelle. Finalement, elle s’est rendue sur le terrain du 28 janvier au 6 février 2003 afin d'évaluer les réalisations du projet. La mission s’est terminée par une restitution le 11 février auprès du Ministère de l’agriculture.

La méthodologie utilisée se basait sur les questions suivantes :

  • Les objectifs du projet, en termes d'impacts sur les conditions de vie dans toute l'acception du terme, ont-ils été atteints ?
  • Les actions entreprises ont-elles été efficaces et adaptées aux besoins des populations rurales et aux objectifs du projet ?
  • Les principaux partenaires intervenant dans le cadre du projet ont-ils été performants ?
  • Les thèmes concrets identifiés par le partenariat conjoint ont-ils été performants ?

Vu l'étendue géographique du projet, la mission a procédé de la manière suivante :

  • Réalisation d'ateliers dans trois localités représentatives de la zone du projet avec, à chaque fois, la participation de représentants: i) des bénéficiaires (paysans, femmes, jeunes); ii) des institutions mises en place par le projet (organisations paysannes (OP), groupement d’intérêt économique (GIE), communauté rurale de développement (CRD)); iii) de l'administration ; et iv) des intermédiaires économiques (commerçants, transporteurs…).
  • L'objectif de ces ateliers était de parvenir d'une part à mettre l'accent sur les impacts du projet tels que ressentis par les bénéficiaires eux-mêmes et, d'autre part, à mettre en lumière les éventuels manquements ou incohérences, toujours sous l'angle des bénéficiaires. La conduite de ces entretiens était structurée selon le questionnaire élaboré par le FIDA en vue de compléter le "Cadre commun d'évaluation de projet", "Questions clef pour l'évaluation d'impact dans les communautés rurales affectées par le projet".
  • Un quatrième atelier s'est ensuite tenu à Dubréka, siège du projet. Il regroupait des participants des trois ateliers régionaux ainsi que des cadres de l'administration centrale à qui la Mission a ainsi pu présenter une sorte de synthèse de son travail de terrain. L'objectif de cet atelier de synthèse était en outre de mener une réflexion sur les évolutions possibles des principaux volets du projet, à savoir : i) quel avenir pour les CRD ? ii) quel avenir pour les ASF? iii) quel avenir pour les GIE et les OP ?
La zone du projet et les groupes cibles

Situé en Basse Guinée Nord sur les premiers contreforts du Fouta Djallon, le projet couvre une zone d'intervention d'une superficie de 21.243 km2, soit environ 10% du territoire national. Cette région au relief accidenté se caractérise par un enclavement important qui l'empêche de mettre en valeur son potentiel agricole et pastoral. De plus, de grosses difficultés d'accès à l'eau potable et aux services de base (dispensaires, écoles, centres culturels) en ont fait l'une des plus pauvres du pays.

La population de cette région est estimée à près de 700.000 personnes (soit environ 10% de la population nationale). La population totale de la zone du projet, pour sa part, compte 480.835 personnes regroupées dans 481 villages ou 145 districts pour 79.348 exploitations agricoles réparties dans 27 Communautés rurales de développement (CRD) et deux communes urbaines.

Dans la zone du projet, on estime que 47% environ de la population sera touchée – directement ou/et indirectement par les activités du projet. Parmi cette population, deux groupes cibles ont été identifiés : i) les ménages constitués de 7 personnes et cultivant en moyenne 1,5 ha; et ii) les ménages de dix personnes cultivant une moyenne de 2,2 ha.

Le groupe cible du projet se compose donc d'environ 28.500 exploitations (soit environ 35% des ménages de la zone du projet) répartis dans 228 villages.

Partenariat et montage institutionnel

Le Gouvernement de la République de Guinée finance l'exécution du projet à travers des prêts accordés : i) par le FIDA à hauteur de 15.250.000 USD (soit 10.200.000 DTS), et ii) par le fonds OPEP à hauteur de 4.000.000 USD (sur un montant total sollicité d'équivalent 6.700.000 USD). Le gouvernement apporte, pour sa part, un montant équivalant à 2.920.000 USD et les bénéficiaires directs contribuent à hauteur de 660 000 USD.

Le projet se réalise sous la tutelle d’un comité de pilotage (Ministère du plan, des finances et de la décentralisation), dépendant du Ministère de l’agriculture, de l’élevage et des forêts. Son exécution concrète est assurée et supervisée par une unité de gestion, sous la tutelle du comité de pilotage et épaulée par un comité de concertation.

L'Institution coopérante reconnue par le FIDA et le fonds OPEP est l'UNOPS, Division Afrique II, UNOPS Abidjan.

Objectifs et composantes du projet

Les objectifs du projet, tels que définis dans le rapport de préévaluation, sont : i) l'augmentation de la production agricole, notamment du riz ; ii) l'amélioration de la sécurité alimentaire et des conditions de vie de la population bénéficiaire, en particulier les femmes et les jeunes ; iii) le développement des infrastructures rurales ; et iv) le renforcement des institutions de base. Le projet vise également l'amélioration des revenus et la protection de l'environnement. Ces objectifs cadrent parfaitement avec la stratégie du gouvernement qui vise la réduction de la pauvreté.

Pour atteindre ces objectifs, le projet était subdivisé en quatre composantes :

  • Appui aux institutions de base : la promotion et la consolidation de l’approche participative est la pièce maîtresse de la stratégie du projet dans la mesure où les populations ont été étroitement associées à tout le processus de programmation et d’exécution des activités.
  • Appui à la production, à la commercialisation et à la transformation : l’augmentation de la production agricole, notamment du riz sur les coteaux et les bas- fonds grâce à l’apport de variétés de semences améliorées, l’introduction de nouveaux paquets technologiques, la mise en valeur des bas-fonds, le reboisement et les activités de commercialisation et de transformation constituent la principale composante du projet visant à améliorer les conditions d’existence des populations bénéficiaires par l’accroissement des revenus et le renforcement de la sécurité alimentaire.
  • Appui au développement des infrastructures rurales : très enclavée, la zone du projet souffre par ailleurs d’un important déficit d’infrastructures socio-communautaires (formations sanitaires, écoles, hydraulique villageoise, bas-fonds aménagés, etc.). Cette composante visait en conséquence à rentabiliser le réseau routier existant, à renforcer les services d’appui et à en améliorer l'accès.
  • Appui à l'Unité de gestion du projet : structure légère, placée sous la supervision d’un Directeur, elle est composée des Chefs de service animant les différents volets et d'un service administratif et financier. L’UGP n’assure pas directement l’exécution des travaux, à l’exception des activités d’animation.

Analyse des résultats obtenus

Le démarrage du projet s'est effectué quasi simultanément avec la mise en place d’institutions décentralisées au niveau national. Le projet a saisi l’opportunité pour faire de ces CRD des institutions partenaires qui ont été par la suite impliquées dans le processus de planification au niveau préfectoral.

Concernant les institutions de base, c'est-à-dire celles qui touchent directement le paysan et sont le reflet de ses souhaits, on peut dire que ce sont les Associations de services financiers (ASF) qui ont eu l'impact le plus marquant au niveau des populations. Le concept de "banques de proximité" est en effet devenu presque synonyme de sécurité et de disparition de l'usure. Le problème majeur sera de voir si les responsables seront à même de gérer ces ASF si le projet vient à se terminer et, également, quel sera leur devenir institutionnel.

La viabilité des Organisations paysannes (OP) dépendra par contre de leur capacité à se structurer pour évoluer vers de véritables unions professionnelles de producteurs. Là aussi, il reste beaucoup à faire en matière de formation et d'accompagnement.

Concernant l'appui à la production, la transformation et la commercialisation, cette composante initialement considérée comme activité principale du projet n'a pas obtenu les résultats escomptés par rapport aux prévisions initiales. Ceci peut cependant s'expliquer par le fait que l'extrême enclavement dans lequel se trouvaient les populations a provoqué un certain attentisme vis-à-vis d'un démarrage des activités de production agricole. Les voies de communication et de commercialisation étant maintenant une réalité, les activités productives se mettent en place. Beaucoup de résultats des recherches effectuées durant la première phase sont disponibles en termes de variétés et de parcours techniques améliorés. Il reste à les vulgariser auprès des paysans en les accompagnant au niveau du suivi et de la formation. Là aussi, l'arrêt du projet serait néfaste pour la pérennisation de ces activités.

Concernant les infrastructures rurales, la demande des populations était telle que cette composante est devenue la priorité, notamment en matière de routes. A ce niveau, l'impact des réalisations du projet a été ressenti de façon très positive par l'ensemble des bénéficiaires car il répond à l’un de leurs besoins les plus élémentaires. Pour les infrastructures, le problème majeur qui se posera sous peu est celui de leur gestion et de leur entretien. Les populations sont conscientes que ces outils sont les leurs et qu'elles doivent les entretenir, mais elles sont également conscientes qu'elles n'ont pas les moyens de faire face à de gros accidents.

Évaluation globale du projet

La mission a constaté que l'ensemble des objectifs mentionnés dans le rapport de préévaluation était pertinent, à l’exception peut-être de l'objectif concernant l'environnement sur lequel le projet n'a pas beaucoup insisté en termes d'activités ou d'allocation budgétaire.

Etant donné l'enclavement dans lequel se trouvait cette zone avant l'apparition du projet, la production agricole pouvait être considérée comme une agriculture de subsistance. Il est donc évident qu'une des premières activités à entreprendre consistait à améliorer les conditions culturales et augmenter les productions.

Il est évident également, vu l'abandon dans lequel les populations avaient été laissées jusqu'alors, que toutes les activités qui pourraient améliorer leurs conditions de vie, notamment pour les femmes et les jeunes, seraient tout à fait pertinentes.

Concernant l'intégration du projet dans le processus de décentralisation entamé par le gouvernement en appuyant les CRD mises en place, la mission considère cette approche comme très pertinente étant donné qu'elle tend à appuyer sa stratégie "d'approche groupements", considérée comme très efficace.

Au niveau de l'efficience du projet, les progrès réalisés dans le but d'atteindre les objectifs définis dans le rapport de préévaluation ont été assez inégaux. En cause principale, les problèmes financiers rencontrés quasiment dès le démarrage et qui ont été un facteur majeur dans l'arrêt ou le non démarrage de certaines activités à des moments où, bien sûr, il n'aurait pas fallu arrêter.

Au moment du passage de la mission, le projet se débattait avec des problèmes financiers qui sont toujours en attente d'une solution. Or, il est évident que ces problèmes trouvent leur origine dès le démarrage des activités du projet, et plus précisément suite au séminaire de démarrage des activités du PAPE-BGN qui s'est tenu du 21 au 27 mars 1997.

Les modifications apportées lors de ce séminaire, en termes d'infrastructures notamment, et qui sont intervenues après la signature des accords de prêt, représentaient des surcoûts avoisinant 25% du financement initial. Ces modifications ont eu lieu en présence de représentants du FIDA et de l'UNOPS qui les ont approuvées sans faire de remarque concernant l'anomalie des surcoûts occasionnés par ces changements.

En tout état de cause, la situation financière pénible dans laquelle se trouve le projet actuellement risque fort d'affecter négativement les bons résultats constatés par ailleurs mais qui nécessitent, pour leur pérennisation, un appui et un suivi rapproché durant encore un certain temps.

Constats principaux et recommandations pour une deuxième phase éventuelle

Il y aurait lieu de recentrer les activités du projet sur des zones représentatives dans les cinq préfectures actuellement couvertes afin de mieux gérer les actions à mettre en place et surtout leur suivi en termes d'encadrement et de vulgarisation.

Les actions à mettre en place devraient essentiellement être des actions en matière d'agriculture afin de rentabiliser au maximum les infrastructures routières mises en place (développement des banques de céréales, des structures de transformation, des groupements de productions organisés autour des activités dans les bas-fonds).

Il est à noter également que des résultats importants ont été obtenus au cours de la première phase en matière de recherche adaptative et que ces résultats peuvent être vulgarisés immédiatement.

L'approche participative, au vu des résultats encourageants obtenus jusqu'à présent, devrait être renforcée et même étendue au processus d'évaluation des activités. Ceci afin de responsabiliser les bénéficiaires jusqu'au processus d'analyse des réalisations.

Dans le même ordre d'idée, l'approche village pourrait être tentée afin d'impliquer l'ensemble des populations sans imposer le préalable d'une adhésion à un groupement.

Une attention toute particulière devrait portée au problème de l'institutionnalisation des ASF, sans parler de la nécessité de fournir une assistance soutenue aux membres de leurs bureaux.

Pour l'avenir, le projet devrait miser sur une participation accrue des CRD et des autres partenaires locaux dans l'organisation et la gestion au jour le jour des activités prévues. Ceci serait non seulement efficace en termes de renforcement du personnel du projet mais permettrait également une formation accrue des partenaires locaux.

En conclusion, on peut dire que le PAPE-BGN, même s'il a été (et est d'ailleurs toujours) confronté à une situation gênante sur le plan financier, a réussi à réaliser un travail important qui mériterait de pouvoir se poursuivre dans l'intérêt des populations concernées par son action. Une seconde phase du projet, si elle voit le jour, devrait être essentiellement axée sur la formation, la vulgarisation et l'information des bénéficiaires ainsi que sur un suivi-évaluation rigoureux permettant à l'UGP d'avoir un instrument de gestion réel des diverses actions engagées par le projet.

 


L’évaluation a été faite par le bureau d’étude Scanagri Denmark à Copenhague. L’équipe était composée de: M. O. OLSEN, Chef de l'équipe, agronome.; M. G. LORETTE, Consultant, Institutions de base et crédit; et M. K. KIMMAGE, Consultant, Sociologue rural. M. F. Nichols, Chargé d’évaluation auprès du Bureau de l’évaluation de FIDA, a assisté au démarrage ainsi qu’à la finalisation des conclusions et recommandations. La mission a pu bénéficier durant tout son séjour de la présence constante de M. Camara, Directeur du projet, ainsi que de l'ensemble de ses collaborateurs suivant les besoins exprimés par la mission.

 


Striving for sustainability and equity (Issue #14 - 2004)

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